Caroline Kilesse
Vijay
and I s’ouvre sur une scène typique
d’un réveil dans une famille ordinaire. Will Wilder (Moritz Bleibtreu) père de
famille, se croit oublié par les siens le jour de son quarantième anniversaire.
Un concours de circonstances le fait passer pour mort. Il décide alors de ne
pas démentir l’information et réalise un fantasme universel : assister à
son propre enterrement. Soutenu par son meilleur ami Rad (Danny Pudi), Will se
transforme en hindou afin de passer inaperçu lors de ses funérailles. De fil en
aiguille, Will se laisse emporter dans sa supercherie et décide alors de rester
à jamais Vijay.
A mi-chemin entre la comédie et la romance,
Sam Garbarski se lance dans un récit audacieux et aborde des thèmes difficiles.
Une question persiste : tous ces thèmes peuvent-ils être mis en
scène ?
D’abord, à travers des dialogues cinglants et
sarcastiques, ce film montre la culture hindou sous toutes ses formes et sans
tabou. Dans son restaurant, Rad formate à la perfection les employés afin de
montrer à la clientèle les serveurs tels qu’elle se les imagine. Du relooking
en passant par les cours de diction à l’épilation intégrale, Will accepte
toutes les contraintes afin de devenir l’indien idéal. Enfin prêt, il fait face
à toutes les réactions négatives de ses proches lors de son enterrement.
L’histoire aurait pu s’arrêter là si sa propre femme n’était pas tombée
amoureuse de lui (Vijay). Il n’avait donc plus d’autre alternative que de
rester dans son personnage et profiter de la fragilité de sa femme pour la
(re)conquérir. Will, Vijay, Vijay, Will…tant de confusion pour finalement ne
parler que d’un seul et même homme.
Ensuite, se pose la question du dédoublement
de la personnalité, autrement appelé la schizophrénie. Camouflée par le
scénario humoristique, cette maladie est bel et bien un trait de personnalité évident
de Will (Vijay). Rêver de vivre en direct ses funérailles est consensuel. En
revanche, ne faudrait-il pas se demander où est la limite entre le fantasme et
la maladie ? Will ne s’est pas juste transformé en une autre personne pour
un laps de temps, il a refusé toute éventualité de redevenir l’homme qu’il
était avant. Après le relooking, l’épilation et l’apprentissage de la culture indienne,
Vijay en vient même à adopter le mode de vie hindou au quotidien pour le plus
grand bonheur de son épouse. Par son ambiance drôle et décalée, le film
parvient à banaliser la schizophrénie.
De plus, les situations sont coquasses mais
parfois immorales et souvent peu réalistes. Après la banalisation de la
maladie, voilà que ce film banalise
également le deuil. Cette période durant laquelle un homme ou une femme doit
faire face à la disparition de son conjoint est généralement abordée avec des
pincettes. Vijay and I montre
l’inverse de ce scénario. En effet, le cynisme dans la présentation du deuil
que subit Julia (Patricia Arquette) n’est pas réaliste et emmène le spectateur
dans un monde immoral. Il rit de cette situation sans penser à son coté
tragique. Ne serait-ce pas malsain ?
Par contre, ce film mériterait la Palme d’Or
de l’immigration réussie. Etre indien deviendrait presqu’un « must ».
En effet, Julia et tout son entourage finissent par préférer Vijay à
Will ; l’indien au « blanc ». Le nec plus ultra est de vivre
dans la peau d’un hindou quelques heures par jour afin d’adopter son mode de
vie social, culturel et professionnel. Enfin un film qui valorise
l’intégration !
Malgré un scénario léger et une mise en scène
sans surprise, Vijay and I propose un
moment divertissant tout en abordant des thèmes délicats.
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